En lourdes bottes de cuir, short moulant, débardeur noir, Eisa Jocson s’avance sur la piste de danse, ondule puis se cambre au milieu des convives, comme il arrive chaque soir dans les clubs de nuit philippins.
Ces clubs, où des hommes dansent pour des hommes – plus rarement pour des femmes – sont uniques aux Philippines. Ce phénomène produit un langage de séduction très particulier car ces hommes, qui disposent de leur corps comme d’un capital, sont ainsi relégués dans une position sociale faible, alors même que leurs gestes portent tous les signes de la virilité.
Incarnée ici par une femme, cette transposition du langage révèle toute l’ambiguïté du sujet, en même temps qu’elle le trouble par une confusion des genres, dans lequel, finalement, chacun de nous s’enchevêtre.
Macho Dancer en scène n’est donc pas seul(e) car cent regards l’accompagnent, mais sans savoir vraiment dans quel registre répondre au sien. D’autant qu’avec la meilleure volonté du monde, on se trouve quand même dans la position du client qui mate, alors qu’on sait pertinemment que ce spectacle, justement, en a subtilisé l’enjeu premier. Un bien joli tour de passe-passe, qui ne cesse de nous troubler.
© Texte & photo : maillon.eu
Chorégraphie : Eisa Jocson
Durée : 40min